Poésie saisonnière
J’accompagne les pas d’un enfant

J’accompagne les pas d’un enfant

J’accompagne les pas d’un enfant, que pense-t-il éloigné des écrans, que lui inspire cette lisière forestière, trouve-t-il un réconfort ou au contraire se sent-il étranger de peur.

Celui-ci, je le connais, il a appris à reconnaître quelques fruits de ces haies bocagères percées par des tailles trop répétitives. Il grimace entre les dents la prunelle de l’épine noire, il sourit à l’aubépine dont son fruit est l’image d’une pomme à Schtroumpfs, il appréciera bientôt la pulpe de l’églantier, il découvre l’élégance du fruit du fusain d’Europe.

L’heure est surtout aux noisettes, noix et châtaignes. Les champignons sont sa plus grande curiosité, il n’ose pas encore les goûter car plane pour lui une histoire de poison mortel. Il apprécie les regarder, les photographier et retrouver son livre de mystérieux chapeaux. Il me dit c’est un voyage les champignons.

Il a encore le short d’un été et le pull d’une pluie orageuse. Les feuilles se colorent, certains arbres ont repris une allure printanière, ils débourrent c’est étonnant mais il fait chaud après la tempête, le thermomètre avoisine les 25 degrés. On est un peu vaseux avec ce temps lourd. On a presque le mal de terre.

J’accompagne les pas d’un enfant qui progresse dans une forêt abandonnée. C’est ce qu’il se dit car les arbres sont ensorcelés de bruits, de crissements, de regards cachés. Là, un sanglier, là, un chevreuil et là des écureuils. Non, il n’y a que des fantômes comme ce châtaignier d’un siècle passé qui trône encore avec ses membres désarçonnés au sol. Il est fortement imputrescible car habillé de mousses, rien ne semble le ronger pour le moment.

J’accompagne les pas d’un enfant qui en haut de cette vallée arborée cherche la lumière et de champs encore bien couverts, il découvre un paysage peigné à la mode, une coiffure à plusieurs raies. Le soja a fait son apparition sur cette terre caillouteuse. Le chemin inondé, ces pas « empreintent » les sillons désherbés des entre rangs de la légumineuse. Seul un compagnon blanc montrant l’ouest fait de la résistance. L’ambroisie a préféré tenir compagnie au sarrasin d’ailleurs on ne sait plus qui fait la culture. Les miradors des chasseurs font les coins du puzzle, ils s’ornent de grimpantes, de tamiers, clématites et autres houblons comme si ces volubiles plantes souhaitaient faire oublier ces Tour Eiffel de la mort.

J’accompagne les pas d’un enfant qui loin des écrans s’arrête et me raconte : « sais-tu que Victor Hugo m’a dit qu’il était triste car la nature parle mais l’homme n’écoute pas. Moi, j’ai écouté, je n’entends rien, aucun mot mais j’ai compris que c’est son silence qui est empli de résonance, d’une chorale de sauvage. Depuis, elle est devenue mon amie, je l’aime cette nature, j’aime son chant mystérieux. »

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